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Les scientifiques sont trop divisés pour éclairer les décideurs

Les organismes génétiquement modifiés (OGM) doivent-ils être interdits? À cette question, posée aux experts par les élus et fonctionnaires chargés de mettre en place des mesures de protection du public, on obtient de multiples réponses. «Quand on consulte les scientifiques pour élaborer des politiques publiques, on risque d’être confronté à une multitude de points de vue. Au lieu d’obtenir un éclairage utile, les décideurs devront gérer une plus grande incertitude qui met en lumière les dissensions au sein de la communauté», affirme Éric Montpetit, professeur de science politique à l’Université de Montréal.

La science peut-elle contribuer à l’établissement de politiques publiques? C’est la question que s’est posée M. Montpetit à l’occasion du 84e Congrès de l’Acfas, tenu cette semaine à Montréal. Bien entendu, elle le fait déjà, puisque les ministères et organismes de règlementation comptent dans leurs rangs de très nombreux scientifiques. À ceux-ci s’ajoutent les spécialistes extérieurs de centres de recherche privés et universitaires. Est-ce suffisant? Certains en doutent.

Dans le cas des OGM, des études nombreuses et crédibles concluent à leur innocuité; d’autres ont donné des résultats mitigés et certaines évoquent des dangers potentiels, notamment sur les colonies de pollinisateurs. Si l’on devait s’appuyer sur la science pour instaurer une règlementation, celle-ci devrait refléter ces contradictions…

À l’heure où d’innombrables informations circulent sur tous les sujets, le public a des attentes irréalistes envers les scientifiques, estime Éric Montpetit. «Les gens pensent que la science éclaire les décideurs. Mais ils sous-estiment l’absence de consensus au sein de la communauté scientifique.»

«C’est la science qui parle!»

Avec son collègue Erick Lachapelle, M. Montpetit a étudié l’acceptabilité sociale de l’exploitation des gaz de schiste. Au Québec, l’écrasante majorité des gens qui se sont prononcés sur le sujet s’y oppose, faisant reculer le gouvernement sur les projets d’exploration. Signataires de mémoires et activistes s’appuient souvent sur des études démontrant leurs dangers éventuels. «C’est la science qui parle!» prétendent-ils.

Or, les études sur la question sont beaucoup plus nuancées. «En réalité, les méfaits de la fracturation hydraulique ne font pas consensus. Les scientifiques sont extrêmement divisés sur la question. Dans la région de New York, l’opinion publique reflète cette réalité, puisque les sondages placent les pour et les contre à 50-50.»

Éric Montpetit estime que l’opposition aux gaz de schiste est donc beaucoup plus politique, voire idéologique, que scientifique. «Il serait plus approprié d’évoquer des raisons politiques pour justifier notre position que de s’appuyer sur la science», conclut-il.

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