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Près d'un salarié sur quatre souffre de détresse psychologique au Québec

La fréquence des problèmes de santé mentale varie significativement entre les différents milieux de travail visés par l’étude, de même que selon le genre.

Les problèmes de santé mentale chez les travailleurs sont relativement importants au Québec : près de 24 % des salariés disent éprouver une détresse psychologique, tandis que 6 % souffrent de dépression et 4 % d'épuisement professionnel.

Et, parmi les sous-dimensions de l'épuisement professionnel, l'épuisement émotionnel touche 12 % des employés, le cynisme 8 % et l'inefficacité professionnelle 11 %.
C'est ce qui ressort d'une recherche1 menée par les professeurs Alain Marchand et Pierre Durand, de l'École de relations industrielles de l'Université de Montréal et chercheurs à l'Institut de recherche en santé publique de l'UdeM (IRSPUM), ainsi que Marie-Ève Blanc, professionnelle de recherche à l'IRSPUM.

Cette recherche est tirée des données de l'étude SALVEO, l'une des plus grandes études aux échelons canadien et mondial traitant de santé mentale au travail : elle repose sur les informations obtenues auprès de 2067 travailleurs issus de 63 milieux de travail choisis aléatoirement parmi les 500 entreprises clientes d'une grande compagnie d'assurance.

Les renseignements recueillis proviennent de questionnaires auxquels les participants ont répondu. Leurs réponses étaient corroborées par des mesures physiologiques, dont la sécrétion de cortisol salivaire, qui est un marqueur du degré de stress.

Qualification et détresse psychologique

La fréquence des problèmes de santé mentale varie significativement entre les différents milieux de travail visés par l'étude, de même que selon le genre.

Ainsi, les symptômes de détresse psychologique, de dépression et d'épuisement professionnel touchent davantage les femmes (26 %, 8 % et 14 %, respectivement) que les hommes (21 %, 4 % et 10 %).

De même, les employés du secteur tertiaire sont deux fois plus susceptibles de rapporter des symptômes de dépression et d'épuisement professionnel que ceux du secteur secondaire.

Pour ce qui est des catégories professionnelles, en comparaison des cadres supérieurs et intermédiaires, la dépression est plus fréquente chez le personnel de bureau et les employés non qualifiés, tandis que l'épuisement professionnel s'observe plus souvent chez les employés non qualifiés.

En parallèle, plus un travailleur avance en âge, moins il présente de symptômes de détresse psychologique et d'inefficacité professionnelle, d'après les observations des chercheurs.

Aussi, une tendance se dégage en ce qui a trait à la dépression et à l'épuisement professionnel : ils sont surtout le lot des hommes peu qualifiés travaillant dans les entreprises de service.

«Ces hommes sont de huit à neuf fois plus susceptibles de manifester des signes de dépression et d'épuisement professionnel, comparativement aux cadres supérieurs et intermédiaires», indique M. Marchand.

Selon lui, les éléments suivants expliqueraient cette situation : une charge de travail accrue, une faible latitude décisionnelle, une utilisation minimale de leurs compétences, un faible soutien des collègues et une insécurité d'emploi.

«La qualification est directement liée à l'état de santé mentale et à la vulnérabilité, surtout chez les hommes, mentionne le professeur. On ignore encore pourquoi cela touche moins les femmes.»

Ce taux de 4 % d'employés disant souffrir d'épuisement professionnel peut sembler bas par rapport à celui d'autres études effectuées notamment aux Pays-Bas. En fait, il reflète l'épuisement ressenti au cours d'une seule semaine, par comparaison avec une période d'un mois sur laquelle reposent les autres études. «Si l'on transposait les résultats de SALVEO sur un mois, on obtiendrait un taux d'environ 13 %, ce qui est analogue aux Pays-Bas», précise Alain Marchand.

Des pistes pour prévenir et intervenir

Pour M. Marchand, l'étude SALVEO permet d'envisager des pistes d'intervention pour prévenir les problèmes de santé mentale selon les différents milieux de travail.

«Nos résultats pointent vers la mise en place d'approches de formation destinées à rehausser le niveau des tâches des individus, afin de leur redonner le goût de s'engager davantage dans leur milieu en évitant la routine, qui est source de démotivation et de perte de plaisir à travailler», conclut le professeur.

Martin LaSalle

1. A. Marchand, M.-È. Blanc et P. Durand, «Genre, catégorie professionnelle, secteur économique et santé mentale en milieu de travail : les résultats de l'étude SALVEO», Canadian Journal of Public Health, mai-juin 2015.

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