Dans toutes cultures et moments de l’histoire, il a existé et existe différentes formes d’identification non conformes aux normes de genre sociétal. Ces formes dépendent de la façon dont les sociétés les incorporent, les normalisent, les répriment ou les effacent (Lee, 2015). Certaines persécutions ont les mêmes racines historiques, par exemple, avec la domination des grands empires coloniaux (Lee, 2015) ou avec la montée politique de la droite conservatrice dans certains pays. Dans les deux cas, le statut des groupes minorisés a pu être réduit (Labelle, 2021). Ainsi, chaque pays a sa propre conception du genre et de la sexualité et les niveaux d’acceptation envers ces personnes sont inégaux, ce qui peut avoir un impact direct sur le risque de discriminations ou sur la possibilité d’accéder à différents services (Tourki et al., 2018 ; Pullen Sansfaçon et al., 2020).

Par ailleurs, pour les parents qui ont un·e enfant trans et non binaire (TNB), naviguant dans une société hétéronormative selon laquelle le genre est binaire, cela peut ajouter des inquiétudes quant à leur sécurité et les confronter à divers défis où ces familles maintiendront stratégiquement un certain niveau de confidentialité quant à la divulgation de l’identité de leur enfant (Capous-Desyllas et Baron, 2017 ; Frappier, 2018 ; Pullen Sansfaçon et al., 2019). De plus, ces parents vivent des enjeux tels que de l’isolement social et peuvent rencontrer différentes critiques virulentes de la part de leur entourage et dans les milieux institutionnels (Pullen Sansfaçon, 2015 ; Pullen Sansfaçon et al., 2022). D’autre part, les parents peuvent se sentir divisés entre l’acceptation de l’identité de genre de leurs enfants et les réalités extérieures (croyances, valeurs, religion, etc.) lorsque ces deux sphères divergent (Zufferey et Pullen Sansfaçon, 2021). Par conséquent, plusieurs motifs et facteurs peuvent être reflétés pour envisager le fait de quitter son pays d’origine pour un autre (Lee et al., 2021). Néanmoins, un écart substantiel peut être observé entre leurs attentes et la réalité au sein du pays d’accueil (Bélanger-Dumontier, 2017). En effet, les migrant·e·s LGBTQ2+ sont plus à risque de vivre de la discrimination fondée sur leurs identités multiples (Lee, 2015 ; Lee et al., 2021) et ne peuvent s’épanouir dans une société où iels ne sont pas reconnue (Medico et Pullen Sansfaçon, 2017 ; Tourki et al., 2018).

Par conséquent, à travers une recherche qualitative phénoménologique, des entretiens seront menés pour recueillir le récit de ces familles ayant des enfants mineur·e·s TNB, afin de faire état de leurs expériences pré-migratoires, migratoires et post-migratoires. Des théories et concepts clés tels que le genre et la mobilité, une approche intersectionnelle et l’éthique de la reconnaissance, ainsi que la perte ambigüe seront privilégiés. Les résultats de recherche contribueront, espérons-le, à l’avancement des connaissances sur les différents motifs qui incitent ces familles à migrer ; les dimensions sociales et individuelles qui facilitent et nuisent aux parcours et comment ; et à savoir comment ces expériences sont négociées et le sens qu’elles leur donnent après avoir migré au Canada. Finalement, ce projet pourrait aider à comprendre les défis rencontrés et les stratégies d’adaptation utilisées par ces familles et s’inscrit dans une volonté de reconnaître leurs savoir, développer leur pouvoir d’agir et de leur donner une voix quant à leurs expériences vécues.

Biographie

Naomie-Jade Ladry est candidate au doctorat en sciences humaines appliquées à l’Université de Montréal et est titulaire d’une maîtrise en sciences de l’administration — gestion du développement international et de l’action humanitaire et du Microprogramme de deuxième cycle en études du genre de l’Université Laval. Elle a récemment intégré les travaux de la Chaire de recherche du Canada sur les enfants transgenres et leurs familles. Ses centres d’intérêt portent sur les questions d’égalité de genre, en particulier les perspectives féministes intersectionnelles, ainsi que les liens entre le genre et les parcours migratoires. Son sujet de recherche traitera du phénomène de la migration des familles ayant des jeunes trans et non binaires (mineurs).

Articles publiées et communications orales

1. Ladry, N.-J., Pullen Sansfaçon, A., Temple-Newhook, J. (2023). Expérience et vécu des parents d’enfants de la diversité de genre vivant en région. Congrès de l’ACFAS : 604 -  Jeunes trans et non binaires : perspective intersectionnelle sur les enjeux, défis et stratégies. 12 mai 2023, Montréal. 

2. Ladry, N.J. Pullen Sansfaçon, A. Chadi, N. London-Nadeau, K.  Taylor A.  Chan, A. Chiniara, L. et Saewyc, E. Abus et violences vécues par les jeunes trans et non binaires.  Criminologie.  Sous Presse.  

3. Fortin-Bédard, N., Lamontagne, M.-E., Ladry, N.-J., Bouchard, D., Lettre, J., Desmarais, C.,

Boucher, N., Best, K.L., Raymond, E., Fougeyrollas, P., LeBlanc A,. Routhier F. (2023). Exploring the experiences of people with disabilities during the first year of COVID-19 restrictions in the province of Quebec, Canada. Disabilities, 3(1) :12-27. doi.org/10.3390/disabilities3010002

4. Fortin-Bédard N, Ladry N.-J., Routhier F, Lettre J, Bouchard D, Ouellet B, Grandisson M, Best KL, Buissière EL, Baron M, LeBlanc A, Lamontagne ME. (2023). Being a Parent of Children with Disabilities during the COVID-19 Pandemic: Multi-Method Study of Health, Social Life, and Occupational Situation. IJERPH, 20(4), 1-15.

5. Beaulieu, J., Robitaille, K., Laganière-Bolduc, R., Farley, S., et Ladry, N.-J. (2022). Lunettes féministes intersectionnelles pour envisager une localisation de l’aide inclusive et sensible au genre. Revenue canadienne d’études du développement. doi.org/10.1080/02255189.2022.2100747

6. Ladry, N.J. Pullen Sansfaçon, A. Chadi, N. London-Nadeau, K.  Taylor A.  Chan, A. Chiniara, L. et Saewyc, E. (2022). Expérience de différentes formes d’abus et de violences vécus par les jeunes trans et non binaires au Québec, 89e Congrès de l’Acfas. 12 mai 2022, Québec.